La promenade des glaciers

 

23 Août 2019, nous quittons le port de Prince Rupert et pour ne pas changer, c’est sous des trombes d’eau que nous faisons nos premiers tours de roue au Canada. Nous commençons à avoir l’habitude maintenant et prenons notre mal en patience. D’ailleurs cette fois nous avons prévu le coup; nous avons contacté en avance des locaux qui pourraient nous héberger via la communauté “warmshowers” (voir anecdote). Nous avançons au rythme de 2 nuits dehors, 1 nuit au sec avec des belles rencontres en prime. Petit à petit, le ciel se dégage, laissant apparaître le soleil pour notre plus grand plaisir. Voilà déjà plus d’un mois que nous sommes sur les routes, on commence à avoir nos petits rituels et habitudes. Nous nous faisons plus rapides pour monter le camp, sans oublier tous les soirs avant de se coucher de prendre soin d’éloigner toute nourriture et produits parfumés (dentifrice, savon,…) de notre tente pour éviter les rencontres nocturnes avec les ours. Pourtant et malgré tous nos efforts, une chose pèche encore. On peine à quitter le camp avant 10h. On a essayé, même à haut taux de caféine, nous ne sommes clairement pas du matin. Cependant, une fois partis, nous roulons à bonne allure, et passons beaucoup de temps sur nos selles. Nous aimons ça, et avalons en moyenne 100km par jour. Pour l’instant à travers champs, en direction des rocheuses.

Le temps d’une pause

Nous prenons une pause à Vanderhoof, 12km après cette petite ville plus exactement. Nous sommes attendu par Felicity dans sa ferme. Nous l’avons contactée quelques jours plus tôt et en échange du gîte et du couvert, nous l’aiderons à la tâche. C’était un point important de ce voyage : donner un peu de temps, aider, apprendre et se sentir utile. Et il y a de quoi faire dans cette ferme : l’hiver arrive dans quelques semaines et il faut tout ramasser avant les premières gelées. Nous sommes assez impressionnés par Felicity, cette jeune agricultrice qui respire la bonne humeur et qui s’occupe de sa ferme maraîchère sans aucune main d’œuvre. Nous passons 2 journées entières à aider ; enlever les tuyaux d’irrigation, déterrer les patates ou encore nettoyer des dizaines de gousses d’ail. Le tout à la cool, entrecoupé de pauses pizza, crumble et même d’un gros potluck pour célébrer le Labor Day (équivalent de la fête du travail). Malheureusement c’est à la hâte que nous devons partir, Daisy s’est bloqué le dos. Nous rejoignons Prince George en stop, nouvelle pause mais cette fois pause ostéo et repos.

Le dos de Daisy remis en place, nous nous attaquons enfin aux tant attendues rocheuses. Nous avançons bon train et prenons chaque jour un peu d’altitude, 100m par 100m. Les champs se sont transformés en collines puis de nouveau en montagnes, nous commençons à vraiment aimer ces paysages. Et alors que le temps se fait plus sombre, nous faisons la rencontre providentielle de Tim qui s’arrête sur la bande d’arrêt d’urgence pour nous inviter à poser notre tente dans sa grange. Nous passons une merveilleuse soirée en compagnie de Susan (sa femme) et de leurs 2 enfants, Aziz and Akenai. Ils habitent dans un coin reculé, de manière presque autonome. Panneaux solaires, eau filtrée de la rivière, poêle à bois, potager et bétail pour la viande. Ici, la machine à laver fonctionne à la force des mollets, puisque reliée à un vélo! C’est beau à voir et cette famille nous inspire. Nous partons le lendemain en fin de matinée, une petite larme à l’œil de cette belle rencontre.

Nous atteignons Jasper le 9 septembre. Point d’entrée vers la route 93, autrement appelée « Promenade des Glaciers ». Drôle de nom pour ce bout de route, situé en plein cœur des parcs nationaux de Jasper et Banff, longue de 230km pour 2300m de dénivelé positif. Une belle promenade en perspective en effet.

Nous nous lançons dans ce nouveau défi, rythme plein d’entrain, les sacoches lourdes de nourriture. Et nous ne sommes pas déçus. Nous avançons, subjugués par ces paysages, longeant des lacs bleu turquoise qui reflètent les montagnes. Nous franchissons notre premier col à plus de 2000m pour ensuite rouler de vallée en vallée, perchés à plus de 1500m d’altitude, entourés par les hauts sommets et les neiges éternelles. Nous avons même la chance d’apercevoir les couleurs de début d’automne, c’est magique. Cerise sur le gâteau, les camions sont interdits sur ce tronçon. 

C’est intense, nous suons mais peu importe. Dans ces moments, on oublie tout et on se laisse transporter. 

Après ces trois jours de « promenade », il est temps de redescendre de notre nuage, nous atterrissons à Lake Louise. Grosse claque, c’est le Disneyland du parc national. Tout est cher, il y a du monde partout. Camping complet, hôtel complet, bus complet, tout affiche complet. On hallucine un peu. Nous avions à la base prévu de faire le détour pour voir ce lac si prestigieux. Un détour de seulement 4km mais finalement, ça ne nous attire plus. Un peu comme notre acte militant à nous contre cette surcharge touristique, on décide de continuer notre chemin, le cœur serein que le plus beau des lacs se trouve ailleurs…

 


Anecdote

 

  • Nous n’en avons pas encore parlé, mais nous utilisons la communauté “Warm Showers” pour dormir au sec, rencontrer des locaux et pouvoir nous reposer entre les étapes. Comme decrit sur leur site, WS est une “plateforme libre et mondiale d’échange d’hospitalité entre cyclistes. Des personnes souhaitant accueillir des voyageurs à vélo fournissent leur coordonnées et accueillent de temps en temps un ou des cyclistes pour partager de bonnes histoires et quelques verres après une bonne douche chaude.” D’ailleurs cette communauté est incroyablement réactive ici au Canada.
  • Contrairement à ce qu’on pourrait penser, nous avons croisé très peu d’animaux sauvages en traversant les parc nationaux de Jasper et de Banff. Nous mettons ça sur le fait que nous roulons souvent en musique et que les animaux ont le temps de fuir avant notre arrivée.
  • Journée record ; 121 km